Lorsqu’on pense aux fibres synthétiques durables, le recyclage occupe souvent le devant de la scène. Mais une autre voie puissante s’ouvre à nous : les polymères biosourcés — des fibres fabriquées à partir de ressources biologiques renouvelables plutôt que de combustibles fossiles. Le pionnier textile suisse Schoeller® est à l’avant-garde de cette transition, en utilisant du polyester biosourcé pour réduire la dépendance au pétrole sans faire de compromis sur la performance.
À la base, il s’agit toujours de polyester — solide, polyvalent et durable — mais partiellement fabriqué à partir de plantes plutôt que de pétrole. Le polyester traditionnel est composé de blocs chimiques issus entièrement de ressources fossiles. Dans une version biosourcée, l’un de ces éléments clés — le glycol d’éthylène — est remplacé par une alternative d’origine végétale, souvent produite à partir de maïs ou de canne à sucre. Le deuxième ingrédient, l’acide téréphtalique, reste généralement d’origine fossile (pour l’instant). Le résultat ? Un matériau offrant des performances techniques identiques, mais avec une empreinte environnementale réduite.
La version développée par Schoeller® s’inscrit dans cette catégorie. Selon les sources de l’industrie, elle contient 37 % de contenu biosourcé — faisant probablement référence à l’utilisation du Sorona® PTT de DuPont, un polyester partiellement biosourcé fabriqué avec le Bio-PDO™, un 1,3-propanediol dérivé du glucose de maïs.
Voici comment le processus fonctionne : le sucre de maïs est fermenté pour produire du Bio-PDO™, qui est ensuite combiné à de l’acide téréphtalique pour former le polytriméthylène téréphtalate (PTT) — la structure de base du Sorona®. Schoeller intègre ce polymère dans certains tissus techniques triés sur le volet, offrant une extensibilité naturelle, une douceur exceptionnelle et une grande résilience, tout en réduisant l’utilisation de ressources fossiles.
Passer à des matières premières biosourcées permet de réduire la dépendance au pétrole et peut considérablement diminuer l’empreinte carbone d’un matériau. Puisque le carbone des plantes provient de l’atmosphère, cela crée un cycle du carbone partiellement fermé — contrairement aux matériaux fossiles, qui introduisent du nouveau carbone dans le système.
Les analyses du cycle de vie montrent qu’un PET partiellement biosourcé peut réduire les émissions de gaz à effet de serre d’environ 20 %, et les versions entièrement biosourcées offrent des réductions encore plus importantes.
Les matériaux biosourcés permettent également d’élargir et de diversifier la chaîne d’approvisionnement en matières premières. Au lieu de dépendre uniquement des raffineries de pétrole, certaines fibres commencent désormais à la ferme. (Avec des réserves : un approvisionnement responsable est essentiel pour éviter la concurrence avec la production alimentaire ou les impacts négatifs sur l’utilisation des terres. Dans le cas de Schoeller, le sucre de maïs utilisé est souvent un sous-produit d’autres processus agricoles.)
Encore plus prometteuse est la perspective d’innovations en fin de vie. Le polyester biophilique de Schoeller est conçu pour se biodégrader dans diverses conditions environnementales — une avancée majeure qui pourrait drastiquement réduire la pollution aux microplastiques si ces fibres se retrouvent dans les cours d’eau ou les sols.
Un synthétique qui offre les performances du polyester, est partiellement fabriqué à partir de plantes et se dégrade en fin de vie ? Voilà une véritable évolution.
Fait intéressant, la logique derrière les matières biosourcées reflète celle du recyclage pré-consommateur — deux approches qui s’attaquent à la durabilité dès l’étape des matières premières. Plutôt que de compter uniquement sur les déchets post-consommation, elles visent à réduire l’impact en repensant l’origine même des matériaux. Qu’il s’agisse de transformer des sucres végétaux en polymères ou de récupérer les chutes de production avant qu’elles ne soient utilisées, ces deux stratégies permettent de limiter le recours à des ressources vierges d’origine fossile. Ce sont des interventions en amont — des moyens de réduire le coût environnemental avant même la fabrication d’un produit.
Alors que le polyester recyclé agit sur la sortie du cycle — en réutilisant les déchets plastiques — le biosourcé s’attaque à l’entrée : l’origine des matières premières. Ces deux approches sont essentielles. Et comme les polyesters biosourcés sont chimiquement identiques au PET conventionnel, ils peuvent intégrer les mêmes filières de recyclage, maintenant ainsi la boucle intacte.
L’avenir idéal n’est pas une question de choix entre l’un ou l’autre — c’est la combinaison des deux. Une veste fabriquée à partir de matières végétales qui peut être recyclée encore et encore. Ou une autre qui se biodégrade en toute sécurité lorsque sa vie utile est terminée.
Le travail de Schoeller s’inscrit dans un mouvement plus vaste au sein de la science des matériaux. L’Ecodear® de Toray utilise 30 % de contenu végétal. Des entreprises comme Covestro explorent des matières premières à base de CO₂. De nouveaux polyesters biosourcés arrivent sur le marché chaque année. La vision à long terme est claire : des matériaux haute performance à empreinte carbone nulle, fabriqués à partir de déchets ou de CO₂ atmosphérique, et conçus pour se biodégrader en toute sécurité ou pour être recyclés à l’infini.
Le polyester biosourcé de Schoeller est une avancée concrète dans cette direction. Il prouve que les fibres synthétiques ne sont pas incompatibles avec la durabilité. Grâce à une innovation réfléchie, nous pouvons repenser la composition des vêtements techniques — et leur place dans l’avenir de la planète.